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Peu d’aliments sont autant objets de controverse que le lait.
Les uns l’érigent en constituant fondamental de notre alimentation tandis que d’autres le dénigrent tant et plus.

Que faut-il en penser ?

laitLes plus anciens se souviennent certainement que, dans les années d’après guerre, les enfants des écoles recevaient un petit berlingot de lait à la récréation. C’est que la population se relevait d’années de privation et que le rachitisme n’était pas exceptionnel. Du bon lait – entier svp ! – rien de tel pour reconstituer de bons os solides et des dents bien saines, disait-on alors.

Mais aujourd’hui, le lait se fait malmener par certains experts tandis qu’il est porté aux nues par d’autres. On sait d’autant moins à qui faire confiance que les intérêts financiers que ces disputes recouvrent sont assez nébuleux.

 Tentons de nuancer, point par point, ses avantages et ses inconvénients.

Lait et calcium : la prévention de l’ostéoporose

Le principal atout du lait est sa teneur élevée en calcium, indispensable à la constitution de nos os et de nos dents.

Nous avons également besoin d’un taux stable de calcium dans le sang en permanence pour assurer la contraction des muscles, la coagulation du sang et la propagation des stimulations nerveuses.
Quand le calcium sanguin vient à baisser, c’est dans les réserves osseuses que l’organisme ira en puiser : si l’alimentation est pauvre en calcium, cela finit donc toujours par nuire à la solidité des os.

La question du calcium est directement liée à celle de la prévention de l’ostéoporose (lire notre dossier sur l’ostéoporose). Il est certain que l’apport en calcium doit être soutenu tout au long de la vie pour garantir la solidité des os jusqu’à un âge avancé. 
Mais certaines études ont montré que la consommation de grandes quantités de lait ne protégeait pas davantage contre l’ostéoporose que des quantités plus limitées. Et même que les pays où l’on consomme le plus de lait sont aussi ceux où le taux d’ostéoporose est le plus élevé. On a appelé cela le « paradoxe du calcium » ; il n’y a pas encore d’explication satisfaisante à tous points de vue de ce phénomène. Peut-être l’association du lait avec une alimentation riche en protéines et en sel favoriserait-elle une perte plus importante de calcium par les urines. Ou que l’excès de calcium aurait un effet de fragilisation des os.

Quoi qu’il en soit, un chiffre est sûr : le seuil minimal de 700 mg/j de calcium en dessous duquel il ne faut en aucun cas descendre sous peine de carence assurée.

D’autres sources de calcium sont cependant disponibles : tous les autres produits laitiers (fromages, yaourts) bien sûr, mais aussi les fruits et légumes, les fruits secs, les légumineuses… Cependant, il faut savoir que l’on atteint difficilement les apports en calcium recommandés sans consommer aucun produit laitier.
On peut donc tout à fait se passer de lait… à condition de manger du yaourt et du fromage en suffisance. Une étude parue en 2014 suggère qu’il serait préférable de remplacer le lait par du lait battu, du yaourt, du fromage blanc ou une portion de fromage. Les légumes riches en calcium et les eaux minérales peuvent également contribuer à atteindre un apport suffisant en calcium.
Quant aux laits végétaux (soja, etc.), ils ne contiennent pas beaucoup de calcium, à moins d’en être artificiellement enrichis (mention sur l’étiquette).

Par ailleurs, la véritable prévention des fractures ne se limite pas à prendre du calcium.
Il faut également :

  •  maintenir un bon niveau d’activité physique, parce que c’est la stimulation des os par les muscles qui renforce le squelette,
  • veiller à un bon apport en vitamine D qui améliore l’absorption de calcium depuis l’intestin et stimule la minéralisation de l’os (voir notre article sur la vitamine D),
  • apprendre à ne pas tomber ! La plupart des fractures résultent en effet d’une chute malencontreuse, bien plus que d’un problème d’ostéoporose ou de manque de calcium.

Lait et lipides : le problème des graisses saturées

Un des principaux reproches des « anti-lait » est sa richesse en acides gras saturés, qui augmentent le « mauvais » cholestérol, avec les conséquences néfastes que l’on sait pour le cœur et les artères.

Cette richesse en graisses fait aussi du lait un aliment plutôt calorique : 66 kcal/100 ml de lait entier, 47 kcal/100 ml de lait demi-écrémé et 37 kcal/100 ml de lait écrémé. Ceux qui surveillent leur poids feront donc mieux de choisir ce dernier.

C’est aussi dans la matière grasse du lait que l’on trouve les vitamines A et D, importantes au point de vue nutritionnel. Un lait écrémé est donc moins riche en vitamines (mais les producteurs en enrichissent de plus en plus le lait artificiellement – c’est alors mentionné sur l’étiquette).

La recherche en technologie laitière s’oriente depuis quelques années vers une production plus qualitative que quantitative. Les nutritionnistes ont attiré l’attention sur la présence dans le lait d’acides gras particuliers, les CLA (acides linoléiques conjugués) qui, bien que saturés, semblent dotés de propriétés protectrices contre les maladies cardiovasculaires et inflammatoires. En jouant sur l’alimentation des vaches, les producteurs de lait tentent d’accroître la part de CLA et de graisses insaturées grâce à une nourriture riche en oméga-3, comme de la graine de lin et du trèfle.

Lait et lactose : risques d’intolérance

À côté des lipides, des protéines et du calcium, le lait contient aussi des glucides, essentiellement du lactose, fournisseur d’énergie. C’est ce sucre qui est responsable de la difficulté qu’éprouvent certains à digérer le lait.
En effet, nous venons au monde avec une enzyme intestinale, la lactase, qui est nécessaire à la digestion du lactose (elle le scinde en une molécule de galactose et une molécule de glucose).
Avec l’âge, certains d’entre nous perdent progressivement cette enzyme, et le lait devient alors source d’inconfort (ballonnements, crampes, diarrhée) quand on en consomme de trop grandes quantités. Il suffit alors de supprimer le lait de l’alimentation pendant quelques jours pour voir si cela s’améliore. Puis de le réintroduire progressivement pour voir jusqu’où va la tolérance, variable d’une personne à l’autre.

L’intolérance au lactose n’empêche pas la consommation d’autres produits laitiers : les fromages à pâte dure ne contiennent plus que quelques traces de lactose et se digèrent donc facilement, et dans le yaourt, une partie du lactose a été détruite par les bactéries qu’il contient.
Il est inutile de vouloir résoudre le problème en remplaçant le lait de vache par d’autres laits animaux (chèvre, brebis…) car ils contiennent également du lactose. Par contre, les laits d’origine végétale n’en contiennent pas.

Lait et protéines : le cas particulier de l’allergie des bébés

Enfin, le lait est également riche en protéines, qui sont les constituants de base de tout notre organisme. Sur ce plan, le lait n’est pas indispensable car nous avons en général une alimentation déjà fort riche en protéines ; seuls les végétaliens stricts risquent la carence.

Par contre, les protéines du lait peuvent causer des soucis à une catégorie très particulière de consommateurs: les bébés.
Quand un nourrisson est allergique au lait de vache, c’est en général aux protéines qu’il réagit.
Cette allergie est très fréquente : elle touche entre 5 et 10% des enfants de moins de 3 ans, mais elle disparaît dans la grande majorité des cas quand ils grandissent. Elle se manifeste principalement par des symptômes digestifs et cutanés (eczéma).
Les parents sont alors tentés de se tourner vers les laits d’autres mammifères ou les « laits » végétaux, mais aucun ne constitue une solution idéale, car les bébés allergiques aux protéines de lait de vache seront presque tous aussi allergiques aux laits de chèvre et de brebis. Les laits de jument et d’ânesse contiennent trop peu de lipides et de glucides pour convenir aux nourrissons.
Et les alternatives végétales (lait d’avoine, de soja, de riz…) sont souvent constitués d’autres allergènes potentiels (noisette, amande, soja). En outre, ils ne contiennent pas assez d’éléments nutritifs pour l’alimentation d’un tout-petit.
Il vaut donc mieux discuter avec le médecin quel lait maternisé hypoallergénique convient le mieux pour chaque enfant en particulier.

Photo © Nick Freund – Fotolia.com

Mise à jour le 20/09/2021

Références
– Tang, Bensoussan et al, The Lancet, Volume 370, Issue 9588, Pages 657 – 666, 25 August 2007 doi:10.1016/S0140-6736(07)61342-7

– Prentice, A. Public Health Nutrition 2004: 7(1A), 227–243 DOI: 10.1079/PHN2003590
– Järvinen et al, BMJ 19 January 2008, Volume 336
– La Revue Prescrire juillet 2007, tome 27 n°285
– Pablo Alonso-Coello et al, BMJ 19 January 2008, Volume 336
– E Warensjö et al. BMJ 2011;342:d1473 doi:10.1136/bmj.d1473
– CLA : projet INTERREG IV B – North West Europe – Projet DAIRYMAN 
– K. Michaelsson, A. Wolk, S. Langenskiöld et al. Milk intake and risk of mortality and fractures in women and men: cohort studies. BMJ 2014; 349:g6015.

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